... Ou l'appel de la créativité dans un bocal
Cet article retrace un tournant récent dans ma pratique artistique.
L’Atelier ou le bocal ?
J’ai eu la chance d’avoir de beaux ateliers, antres de création (à Toulouse et à Gaillac), jusqu’en 2016. Mes toiles étaient grandes (parfois huit mètres), peintes au sol et le geste était libre et fougueux. La matière ainsi que le rapport aux textures et aux outils faisaient partie intégrale de mon travail. Par la suite, les « problématiques » parisiennes d’espaces restreints ont fait que je n’en avais plus.. , et l'énergie consacrée à mon ancien métier d'enseignante avait tendance à grignoter ma créativité.
J’ai donc dû mettre à profit l'an dernier ma capacité d’adaptation pour pouvoir créer . Parce que l’appel de la créativité était trop fort, trop nécessaire. À l’image des poissons rouges s’adaptant au bocal qui les contient, j’ai donc naturellement été amenée à travailler avec un outil plus accessible dans ce contexte: le numérique.
Versions initiales et re-visites : vers un grand puzzle libérateur
Parfois les tableaux sont comme la vie : il y a des actes, des paroles, des événements qui surgissent à un instant bien précis, que l’on prend comme ils viennent et qui ont un impact plus ou moins signifiant.
Et puis, des années plus tard, on revit quelque chose de similaire, familier ou quelque chose qui nous rappelle ces paroles, ces événements, ces actes. On les voit alors sous un jour nouveau, ils nous délivrent un sens nouveau. C’est ainsi que certains dessins ou tableaux, laissés inachevés (ou que je croyais achevés) ont à un moment donné ressurgi dans ma vie, et que des années plus tard je suis venue les « terminer » , pour boucler la boucle.
Lorsque je peins, je laisse venir les traits, les couleurs et la composition de manière spontanée, intuitive. Ce n’est qu’après avoir fini que je prends du recul dans un second temps, et que je laisse venir à moi les « messages » qu'offre la peinture.
En réalité, je ne sais jamais quand un tableau sera fini. Ce qui me guide dans l'instant où je peins, c'est mon état émotionnel, non pas les aspects techniques (même si je m'y attache dans un second temps) : j'arrête quand je le sens. L'Art étant pour moi un exutoire et une exploration intime.
C'est ainsi que j'ai repris cette année passée d'anciennes créations pour en faire des versions nouvelles.
De gauche à droite : "La Porte de la Reliance", "Canopé", "Éxuvie" et "Spalactes".
Dessin sur papier en noir et blanc, puis association avec matières à l'encre ou à l'acrylique et/ou photographie argentique et numérique.
À partir de là, s'est tracé devant moi un "Parcours", comme un grand puzzle reconstitué. Naturellement ces créations hybrides (entre le dessin, la peinture et le numérique) se sont inscrites dans 9 séries qui retraçaient un cheminement intérieur personnel :
D'abord, les "Scènes de la vie quotidienne" : instants fugaces et éternels fixés sur la rétine, quotidien sublimé pour faire de l'insignifiant le témoin des émotions. Les "Narrations picto-photographiques" pour interroger la réalité, empreinte à la fois de tous les possibles en un instant et des multiples directions qui se présentent à l'individu. Les "Scènes humaines", par les nus et les portraits, pour questionner la dimension physique et la dimension mentale qui co-existent en chacun de nous.
Ensuite, on bascule un peu plus hors de la réalité avec les "Escales en Terre Intérieure", reflets de longues heures de dialogue intérieur entre l'introspection et la contemplation.
Puis, les "Pensées VéGestatives" laissent entrevoir tout le bagage intérieur qui sommeille en nous. "Les paréidolies matiéristes" pour accueillir l'illusion et permettre au spéctateur de créer lui même du sens librement sur ce qui se présente à lui. Les "MécaNidations", quant à elles, pour s'ancrer dans un monde imaginaire où se rejoignent les transformations et les possibles.
Enfin le voyage se termine par les "Oniriques", monde des songes qui me guident et les "MétaMorphoses".
Dans ce parcours, on voyage du figuratif à l'abstrait, d'un médium à un autre, du passé au futur, de la réalité à l'onirique...
Oeuvres uniques, reproductions et vidéos
Etant très attachée, depuis le début de ma pratique conscientisée, à la matière, aux textures, au rapport au papier et à la toile, introduire du numérique dans mon travail m’a questionné : en quoi les oeuvres uniques restent-elles uniques ? La réponse semblait courte dans un premier temps: pour chaque oeuvre, il n’y a qu’un tableau. Les oeuvres que j'ai défini en reproductions, quand à elles, ont été crées spécifiquement pour des éditions limitées.
Au départ de cette pratique, le numérique intervenait en fin de processus, celui-ci étant une touche finale parmi les techniques traditionnelles des beaux arts. Les tableaux créés à ce moment là n'étaient donc pas purement des oeuvres numériques. Ils sont hybrides (cette démarche est expliquée sur la vidéo "À l'Aube de l'Arbre" à retrouver sur ma chaîne Youtube).
Cette approche de l'Art Numérique, bien que me bousculant sur certains aspects en tant que peintre, m'aura permis de libérer autrement ma créativité, ainsi que de m'ouvrir sur de nouveaux projets (voir "Closed-Eye Visualizations"), et de pratiquer à nouveau la photographie qui s'intègre dans certaines créations. Et enfin de faire évoluer ma pratique avec son temps.
Ayant désormais à nouveau un atelier, je reviens actuellement à la peinture pure. Issus des "Pensées VéGestatives", c'est sur les Arbres Trans-Générationnels que je travaille en ce moment.
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